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Maman - à quand la reprise du sport après la grossesse ?

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Reprendre le sport après une grossesse, c’est possible, mais quand et comment ? Les recommandations des différents-es- professionnels-y-les de la santé sont parfois approximatives, voire même contradictoires. Le but de cet article est de clarifier quelques points afin de reprendre une activité physique adaptée à ses propres besoins. Pour ce faire, nous allons nous poser quelques questions et proposer quelques définitions.

Quelques repères dans le temps de la période après grossesse

Typiquement, la période postpartum est divisée en 2 catégories : le postpartum immédiat, de l’accouchement à 6 semaines, date à laquelle on a un contrôle gynécologique, puis le postpartum tardif de 6 semaines à 12 mois… eh oui, un an ! Ce fameux rendez-vous des six semaines est l’occasion pour les femmes de recevoir (ou non) le feu vert pour reprendre le sport. Mais est-il vraiment judicieux d’éviter toute forme d’activité physique pendant six semaines, puis de retourner courir « tranquillement, juste 20 minutes » tout en « évitant de faire des abdos » ? La réponse est non ! Commencer quelques exercices pour le périnée, la sangle abdominale et pelvienne, ainsi que reprendre la marche permet de commencer la transition vers la reprise en douceur. Mais quelle est la prochaine étape ?

Quel sport vais-je reprendre et à quel niveau après ma grossesse ?

L’objectif doit être réaliste. Si j’ai toujours pratiqué mon sport et que je souhaite y retourner, je ne serai pas confrontée aux mêmes obstacles que celle qui aimerait atteindre un niveau supérieur à celui d’avant sa grossesse. Il faudra tenir comptes de facteurs tels que le type d’entraînement et le temps nécessaire pour atteindre mon objectif.

J’entends souvent « je vais me remettre à courir un peu, ça me renforcera ». Malheureusement ce n’est pas le cas, surtout s’il persiste des dysfonctions des muscles du tronc (abdominaux, plancher pelvien). Au contraire, on ajoutera de la charge à un système incompétent. Il est important de connaître les prérequis, ou les conditions nécessaires à supporter les contraintes liées au sport pratiqué. Par exemple, dois-je améliorer ma fonction cardio-respiratoire ? Quels sont les impacts de mon sport sur la pression abdominale, donc le périnée ? Quelles sont les parties du corps les plus sollicitées ? Cela nous amène tout naturellement à la question suivante.

Dans quelle forme physique suis-je aujourd’hui ?

Voilà une autre question qui influencera la rapidité à laquelle il sera possible de reprendre une activité physique. Si ma grossesse s’est bien passée et que j’ai pu poursuivre mon activité physique en l’adaptant, que ma prise de poids est restée sous contrôle, je serai avantagée par rapport à une femme plus sédentaire ou à une autre qui a dû réduire son activité physique de manière importante.

Un autre facteur déterminant est le déroulement de l’accouchement. S’il est sans complication, il sera moins éprouvant pour le corps. En revanche, l’atteinte des muscles du plancher pelvien en cas de déchirure importante, d’épisiotomie ou d’accouchement aux forceps, implique la nécessité d’une rééducation périnéale spécialisée. De même, un accouchement par césarienne ou la présence d’un diastasis des grands droits demandera une attention toute particulière à la rééducation des muscles abdominaux. Enfin, en cas de grossesses rapprochées sans réelle reprise d’activité physique, je devrai tenir compte de la diminution de ma condition physique générale.

Un bon moyen de m’auto-évaluer est d’observer si j’ai des plaintes particulières, des douleurs, des sensations de pesanteur dans la vulve, de la difficulté à contrôler ma continence, une ptose abdominale (le ventre qui pend), des maux de dos ou des articulations. Et même en l’absence de plaintes, ma posture se sera modifiée avec la grossesse, ce qui risque d’entraver la récupération des muscles du tronc de manière équilibrée.

Quels seront les facteurs qui limiteront ma progression ?

Avant de me lancer dans ma rééducation et mon programme de remise en forme, je dois garder en tête que je ne contrôlerai pas tous les facteurs qui peuvent influencer cette dernière. Dans le cadre de l’entraînement, la récupération est clé, ce qui implique que la qualité de mon sommeil, mon équilibre alimentaire, mon hydratation et même mon état émotionnel peuvent influencer ma progression autant positivement que négativement. Et si mon bébé me réveille plusieurs fois par nuit pour allaiter et que je n’ai pas le temps de m’asseoir pour manger la journée, il est inutile de chercher à ajouter un entraînement physique dans mon emploi du temps déjà surchargé ! S’entraîner implique aussi l’obligation d’organiser son temps d’entraînement. Est-ce que mon environnement familial, social et professionnel me permet de libérer le temps consacré à mon entraînement ? 

D’autres facteurs liés au contexte du postpartum ont aussi un rôle à jouer dans ma progression, notamment l’imprégnation hormonale liée à la lactation. Cette dernière prolonge la production de progestérone qui favorise la laxité ligamentaire. Cela ne veut en aucun cas dire que je dois attendre la fin de l’allaitement pour me remettre au sport. En revanche, il sera d’autant plus important de mettre l’accent sur le renforcement musculaire afin de limiter le risque de surcharge.

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La reprise du sport est compromise et doit être accompagnée par un professionnel spécialisé dans les cas suivants

  • moins de 3 mois postpartum
  • allaitement
  • dysfonction des muscles du plancher pelvien antérieure à l’accouchement
  • cicatrices d’épisiotomie ou déchirures périnéales
  • Incontinence urinaire à l’effort
  • pesanteur vaginale, descente d’organe(s) pelvien(s)
  • césarienne
  • ptose abdominale, diastasis des grands droits
  • douleurs lombaires ou pelviennes
  • syndrome d’hypermobilité
  • REDS (anciennement triade de l’athlète)
  • obésité
  • perte de sang se poursuivant 8 semaines postpartum
  • troubles psychologiques prédisposant une mère à un entraînement inadapté

En résumé

Avant de me remettre au sport, je dois connaître ma situation actuelle et notamment les facteurs de risque de dysfonction pelvienne et abdominale. Cela me permettra de définir un objectif clair et un plan d’action réaliste pour y parvenir. Je dois aussi tenir compte des facteurs environnementaux qui augmentent le stress et la charge appliquée à mon corps. Afin de traverser cette période avec succès, il est important d’être accompagnée par un-e physio ou /et préparateur/trice physique spécifique ayant des connaissances du postpartum.

 

Bibliographie

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